CHINE
Synthèse: Si l'épidémie de nouveau coronavirus a lieu à Houston, aux États-Unis ?
        
2020-02-18 08:17 | RCI

Note de la rédaction: Joshua Cooper Ramo est co-directeur général et vice-président de Kissinger Associates. L'article reflète les opinions de l'auteur et pas nécessairement celles de China Media Group.

Je vivais à Beijing lors de l'épidémie du SRAS en 2003. Plus de dix ans plus tard, alors qu'un nouveau coronavirus a contaminé des dizaines de milliers de personnes, je suis devenu plus vigilant en cette période spéciale.

Tout d'abord, la manière dont la Chine fait face à l'épidémie a évidemment progressé par rapport à 2003. Des millions de personnes s'engagent dans la lutte, de grandes usines s'activent pour produire conjointement les équipements nécessaires pour lutter contre l'épidémie, des avions acheminent les médecins et les infirmières ayant l'expérience de la lutte contre le SRAS et d'autres virus, tout ceci est sans précédent.

Lorsque vous voyez l'ampleur et l'incroyable vitesse de la réaction nationale en Chine, deux choses marquent l'esprit. Premièrement, l'épidémie de coronavirus de 2020 restera un événement déterminant dans la conscience publique, politique et sociale en Chine, de manière similaire à 2008, lorsque le pays a organisé les Jeux Olympiques d'été, avant l'éclatement soudain d'une crise financière mondiale. Après cette épidémie, la Chine se percevra d'une manière différente, et le monde également. Tout comme le "11 septembre" aux États-Unis, un événement qui reste gravé dans le cœur de toute une génération américaine.

En tant qu'observateur, la deuxième question qu'on se pose forcément est : que se passerait-il si cette épidémie se déclenche à Houston ? Allons-nous mettre la ville en quarantaine ? Limiter les voyages ? Obliger les gens à accepter le contrôle de leur température deux fois par jour ?

Ce n'est pas une question absurde, non pas parce que le coronavirus se répandrait à grande échelle aux États-Unis - il est trop tôt pour savoir si cela se produira - mais parce que nous vivons dans une ère de réseaux connectés à grande vitesse, que nous peinons à comprendre et à gérer. Et les contagions sont une caractéristique de ce monde. Les fausses nouvelles, la peur, le nationalisme et la maladie se propagent plus rapidement que jamais.

L'histoire qui se déroule véritablement en Chine et dans le monde n'est pas seulement celle d'une épidémie. C'est aussi la bataille d'une génération contre les dangers troublants de notre ère connectée. La période de la guerre froide était une ère d'isolement. Celle de la mondialisation conçoit des connexions simples, faciles et porteuses d'espoir. Mais elle est aussi porteuse de besoins concurrents : d'une part, le respect de la vie privée, et de l'autre, une constante connexion. Dans ce contexte, le nouveau coronavirus est un test. Et pas seulement pour la Chine.

Adam Smith avait observé, en 1759, que même un brave Européen serait plus perturbé par la perte de son petit doigt que par la destruction de la Chine par un tremblement de terre. Mais qu'en est-il à une époque d'interconnexion ? Votre tremblement de terre est mon tremblement de terre. Votre virus est mon virus.

Donc, aussi tentant soit-il de se déconnecter, d'élever des murs, de se «découpler» des autres pays ou d'attiser le racisme au moyen de métaphores, nous ne devons pas le faire. Le problème auquel nous sommes confrontés et auquel les Chinois sont confrontés aujourd'hui est vraiment le même : comment faire face aux exigences meurtrières de notre nouveau monde complexe et connecté ?

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